Portrait: Pierre Paulin 1/2

Pierre Paulin (1927-2009) est un des plus grands designers français de l’après-guerre. Il est, sans conteste, l’égal d’un Jean Prouvé et est surement aujourd’hui le designer français le plus connu, avec Philippe Starck. Peu connu du grand public francophone de son vivant, à l’image de Roger Tallon, le père du design industriel français, il fut au contraire célébré à l’étranger dès les années 60, reconnu par ses pairs américains et scandinaves. Comme beaucoup de très grands créateurs de son époque, ce fut un touche-à-tout : du mobilier artisanal au design total en passant par l’aménagement intérieur. Plongez dans l’univers de Pierre Paulin, c’est revisiter 50 années de création marquées par des assises devenues des icônes du design moderne et contemporain. C’est aussi revisiter l’histoire des lieux du pouvoir en France. [caption id="attachment_8365" align="aligncenter" width="229"]Designer Pierre Paulin, portrait Pierre Paulin, portrait[/caption] Pierre Paulin a grandi dans un milieu familial privilégié. Surtout, il nourrit de l’admiration pour le travail de son oncle Georges Paulin, ingénieur-styliste pour les marques Peugeot, Rolls-Royce et Bentley. Élève inadapté au système scolaire, il entre finalement en 1947 au Centre d’art et de techniques, une école qui deviendra l’école Camondo en 1967 à Paris. Très vite, dès le début des années 50, il cherche des éditeurs capables de donner vie à ses projets.

1950 - 1970: l'émergence d'un designer d'exception

Et c’est la célèbre maison d’édition Thonet qui lui donnera sa première véritable chance. À l’instar des éditeurs américains que sont Knoll et Herman Miller qui commercialisent des gammes dans le mobilier d’intérieur, Paulin va développer une gamme de sièges de bureau et de mobilier collectif pour Thonet. Parmi les pièces déjà remarquées à l’époque, figurent le Fauteuil CM137 dit Coquille (1953), ou encore le Fauteuil CM170 dit Tripode cage (1955). Paulin exprime déjà un goût prononcé pour les formes arrondies et incurvées qui participent d’une certaine recherche du confort. [caption id="attachment_8366" align="aligncenter" width="400"]Pierre Paulin, Fauteuil de repos CM137, vers 1953, éditeur Thonet France Pierre Paulin, Fauteuil de repos CM137, vers 1953. Editeur : Thonet France[/caption] [caption id="attachment_8367" align="aligncenter" width="400"]Pierre Paulin, Fauteuil CM170 dit Tripode Cage, 1955. Editeur : Thonet France Pierre Paulin, Fauteuil CM170 dit Tripode Cage, 1955. Editeur : Thonet France[/caption] Mais c’est la maison d’édition de meubles basée à Maastricht (Pays-Bas), Artifort, qui va permettre à Pierre Paulin d’accéder, très rapidement, à la notoriété internationale en créant des sièges devenus depuis des icônes du mobilier contemporain. De 1960 à 1970, Pierre Paulin, après avoir fait ses classes chez Thonet et appris de ses contemporains – il possède une admiration sans faille pour le couple Eames -, est prêt pour développer des modèles plus personnels qui feront sa signature, en s’appuyant sur ses propres recherches de l’époque. En 1960, il crée pour Artifort le Fauteuil n°560 dit Mushroom, à cause de sa forme. De tous les sièges qu’il a créés, c’est le préféré de Pierre Paulin dont il dit qu’il est le meilleur qu’il ait fait « économiquement, mécaniquement, financièrement ». Élégant, arrondi, avec une idée de cocon pour celui qui s’y assoit, le Fauteuil Mushroom est devenu un indémodable du design contemporain. [caption id="attachment_8369" align="aligncenter" width="464"]Pierre Paulin, Fauteuil F560 dit Mushroom Pierre Paulin, Fauteuil F560 dit Mushroom[/caption] [caption id="attachment_8371" align="aligncenter" width="300"]Fauteuil Fauteuil "Mushroom" bleu Artifort, Pierre PAULIN - 1960 | en vente sur design-market.fr[/caption] Le Mushroom représente un aboutissement technique pour Pierre Paulin. En effet, dès ses premières collaborations avec Thonet, il menait des recherches pour habiller ses créations avec une housse en textile extensible. L’idée sous-jacente au projet : recouvrir la structure métallique du siège d’une mousse puis enfiler par-dessus une housse sans couture, un peu comme un maillot de bain. Il s’agit là d’un nouveau procédé de fabrication qui révolutionne la conception du siège. Plus besoin de clous pour fixer le textile, l’assise « enfile » une nouvelle peau. C’est Harry Wagemans, le PDG d’Artifort qui ira trouver en Norvège le tissu adéquat pour réaliser les housses, qui seront donc élaborées à base de jersey. En pleine période Pop art, Paulin peut jouer avec les couleurs alors en vogue à l’époque. Les housses conçues en jersey s’enlèvent facilement, se lavent, on peut les changer à loisir… Surtout, il réussit un meuble qui nécessite une économie de moyens. Pour la structure, trois ronds en acier suffisent, reliés entre eux par quatre tiges. C’est une réussite pour celui qui veut démocratiser le design et en faire un produit abordable. Par la suite, Paulin continue de concevoir ses sièges sur le modèle d’une forme monobloc qui allège la structure. En 1966, Artifort présente la Ribbon Chair, une assise en forme de ruban replié. Encore une fois, par-dessus la mousse de polyuréthane, le textile jersey extensible moule parfaitement l’assise pour en faire une pièce unique et sensuelle. Une année plus tard, Paulin, en amoureux des formes, crée la Tongue Chair, également appelée modèle n° 577. En pleine période des sixties, la pièce est emblématique de ces années qui revendiquent une nouvelle manière de vivre hédoniste. Une ligne souple, fluide et colorée, en phase avec son époque. Enfin, que dire de la Orange Slice , conçue en 1960 ? Une forme intemporelle et une pièce qui change de forme en fonction du point de vue adopté ! [caption id="attachment_8372" align="aligncenter" width="600"]Fauteuil Artifort Fauteuil Artifort "Ruban" et ottoman rouges, Pierre PAULIN - 1960 |En vente sur design-market.fr[/caption] [caption id="attachment_8373" align="aligncenter" width="400"]Fauteuil Tongue Fauteuil Tongue "F577", Pierre PAULIN - 1960 | En vente sur design-market.fr[/caption] Retrouvez la seconde partie de cet article: Après 1970: une nouvelle dimension de son oeuvre

Ecrit par François Boutard

Partager ce contenu

Ajouter un commentaire