Oscar Niemeyer (1907-2012) est peut-être l’architecte du XXe siècle le plus connu dans le monde entier avec Le Corbusier. Père du modernisme brésilien, il accède à la notoriété internationale avec le projet de construction d’une nouvelle capitale pour le Brésil, Brasilia, inaugurée en grande pompe en 1960. Héritier des pionniers de l’architecture moderne et par la suite du style international, Niemeyer va développer son propre langage architectural. Actif jusqu’à la fin de sa vie, sa dernière grande réalisation qui est le Centre culturel international Oscar Niemeyer ouvre 1 année avant sa mort, en 2011. Focus sur 6 grandes œuvres majeures qui définissent son style, un modernisme « tropicalisant ».
Oscar Niemeyer naît en 1907 à Rio de Janeiro. Dans son enfance, il travaille dans l’imprimerie familiale, son père est graphiste. En 1929, il entre à l’Ecole des Beaux-Arts de Rio pour en sortir en 1934 avec un diplôme d’architecte. Il commence par travailler gratuitement pour le très renommé architecte Lucio Costa (1902-1998), conscient de confronter ses idées à ce qui se fait de mieux alors.
Bonne pioche ! Lucio Costa va permettre à Niemeyer de faire ses premières armes sur des projets très ambitieux. C’est ainsi qu’en 1936, Niemeyer travail avec Lucio Costa sur le projet du Ministère de l’Education et de la Santé publique à Rio ; avec, excusez du peu, comme consultant Le Corbusier !
Lucio Costa lance la carrière de Niemeyer. Les années 30 sont marquées en architecture par le développement du style international. Walter Gropius (1883-1969) et Ludwig Mies van der Rohe (1886-1969), respectivement fondateur et dernier Directeur de l’Ecole du Bauhaus, exportent aux Etats-Unis avec succès leur conception d’une architecture moderne marquée par un grand minimalisme, un rejet de l’ornement et l’adoption du verre, de l’acier et du béton comme matériaux de base. Oscar Niemeyer est alors très attiré par l’architecture moderne prônée par Le Corbusier, dont les théories sont assez proches de celles de Gropius et Mies van der Rohe.
Si les idées de l’architecture moderne séduisent Oscar Niemeyer, il réalise en 1943 un premier coup d’éclat qui porte en germe sa signature architecturale. L’Eglise Saint-François d’Assise de Belo Horizonte communément appelée en portugais « Igreja de Pampulha » est un des premiers édifices de style moderne au Brésil.
En 1953, Niemeyer fait édifier pour sa famille une résidence à Canoas in Barra de Tijuca, un des faubourgs de Rio de Janeiro. Projet personnel, il dévoile le goût de Niemeyer pour la simplicité des courbes et la pureté des lignes. Niemeyer s’affranchit du style rigide et fonctionnel de Le Corbusier. Le bâtiment est une fusion de l’architecture organique – on pense évidemment à Frank Lloyd Wright – et minimaliste.
Puis vient la consécration avec le projet pharaonique de désenclaver le cœur du plateau central brésilien avec la création d’une nouvelle capitale, Brasilia. Juscelino Kubitschek, Gouverneur de l’état du Minas Gervais, devient Président du Brésil (1956-1961). Il connaît Niemeyer pour la réalisation de la « Igreja de Pampulha » et, sans hésiter, vient le chercher avec Costa pour édifier le symbole du Brésil moderne. Lucio Costa est l’urbaniste en chef, Oscar Niemeyer est chargé de faire construire les principaux édifices publics. Parmi les réalisations emblématiques de Niemeyer, la Cathédrale de Brasilia (1959-1970) est un des chefs d’œuvre du maître carioca.
Avec l'arrivée au pouvoir de la dictature militaire au Brésil le 31 mars 1964, Oscar Niemeyer, membre du parti communiste brésilien, est obligé de fuir. Il trouve refuge en France où il va exercer durant 2 décennies son talent. Parmi les grands chantiers de Niemeyer, la réalisation du « Volcan » (1978-1982) immense « pot de yaourt renversé » dans lequel s’installe La Maison de la culture du Havre en 1990, marque les esprits.
Bien que Niemeyer se définisse avant tout comme un architecte, il dessina aussi durant sa longue carrière du mobilier. En 1978, il conçoit avec sa fille Anna Maria Niemeyer, la célèbre chaise longue Rio. Élégante et gracieuse, cette assise est un nouvel éloge aux courbes si chères à Niemeyer.
Si son œuvre architecturale est associée au style international et à l’architecture moderne, Oscar Niemeyer s’est affranchi des formes rectilignes de ses aînés pour proposer un style international plus organique et sensuel. Celui qui déclare avoir toujours aimé les courbes parce qu’elles sont l’essence même de la nature, et qui s’oppose à l’uniformisation des systèmes répétitifs en architecture, a su créer une nouvelle expression architecturale, une ode à la poésie et à la liberté des formes.
Dernière œuvre emblématique du génial architecte que nous avons retenue, la conception du Musée d’art contemporain de Niteroi, élevé en bordure de la baie de Rio entre 1991 et 1996, est une synthèse magistrale du savoir-faire et du style Niemeyer. Assisté de l’ingénieur Bruno Conrini, Niemeyer dessine une figure révolutionnaire dont les formes circulaires évoquent une soucoupe. L’ensemble est évidemment réalisé en béton brut peint en blanc pur. Le visiteur est invité à parcourir une longue rampe courbe qui le mène à l’intérieur de l’édifice. Une œuvre poétique qui ressemble à une fleur émergeant de la falaise ; le testament futuriste de Niemeyer.
François Boutard