Quand on évoque le style Hollywood Regency, autrement appelé Regency Moderne, on pense à Hollywood, Los Angeles, et ses studios de cinéma.... Mais de quelle époque parle-t-on ? Celle de l’âge d’or des studios du cinéma Hollywoodien et leurs stars aux contrats mirobolants, des années 20 aux années 50. Le style Hollywood Regency désigne le design d’intérieur et l’architecture moderne de ces années folles durant lesquelles les stars d’Hollywood affichaient impunément leur train de vie luxueux à travers la décoration glamour et tape-à-l’œil de leurs maisons. Il perdura encore dans les années 60. En quelque sorte, le style Hollywood Regency se devait de mettre en scène la célébrité de ces étoiles du cinéma dans un écrin à la fois suave, chic et sexy. Quels furent les promoteurs de ce style et que prônaient-ils en matière de décoration/design ?

2 personnalités majeures ont incarné ce style typiquement anglo-saxon : William Haines (1900-1973) et Dorothée Draper (1889-1969). Commençons par le premier qui se destinait à une carrière dans l’industrie du cinéma. Dans les années 20, William Haines commençait à se faire un nom en tant qu’acteur, d’abord chez MGM puis Colombia. Sa carrière prit brutalement fin en 1933 à cause de son homosexualité assumée que les studios lui demandèrent de réduire au silence avec un mariage arrangé. Haines refusa, et comme il avait un goût prononcé pour la décoration, il lança une entreprise de design d'intérieur avec son compagnon Jimmy Shields.
L’affaire marcha du tonnerre, jusqu’à son décès en 1973, car Haines avait un carnet d’adresses à faire pâlir un directeur de studio. Parmi ses clients, des amies déjà starisées comme Joan Crawford, Gloria Swanson, Carole Lombard, Marion Davies ou encore le réalisateur George Cukor. Le tout Hollywood s’arrachait ses services pour aménager et décorer des intérieurs plus fastueux les uns que les autres. En termes de décoration, le style Hollywood Regency privilégiait les surfaces scintillantes et brillantes, le doré (lampadaire à fleurs, miroirs et cadres), des meubles aux surfaces laquées, du chrome et des miroirs de grandes tailles. Le Sunburst, un miroir en forme de soleil doré devint un classique de ces années d’opulence. Le Hollywood Regency rappelle un peu le style rococo et contraste avec l’ornement strict et répétitif du baroque.

Côté meubles, Haines disposait dans d’immenses espaces intérieurs des divans, des canapés, des chaises élégantes, de petites tables d’appoint et des coiffeuses en miroir. Les assises étaient souvent capitonnées, les coussins de siège, les tapis et les nappes parés de motifs de tissus art déco, les canapés recouverts de satin et velours aux couleurs vives. Également antiquaire, Haines aimait aussi plaçait ici et là des chinoiseries laquées et brillantes.






Comme William Haines, Dorothy Draper utilisa le style glamour du Hollywood Regency pour créer une ambiance dramatique et ainsi mettre en valeur les célébrités dans leur intérieur. Née Tuckerman, Dorothy Draper appartient à la haute société, son mari ayant été le médecin personnel de Franklin D. Roosevelt. Décoratrice d’intérieure dans l’âme, elle fonda en 1925 une des premières entreprises officielles de design d’intérieur. Durant sa carrière, Draper conçut des schémas décoratifs de maisons, hôtels, restaurants, théâtres, et grands magasins.
Anti-minimaliste, on qualifia son design de « baroque moderne » ou « American Baroque », dans le sens où elle n’hésitait pas à combiner des couleurs intérieures spectaculaires (rouge, rose, vert acide) dans les intérieurs qu’elle aménageait. Sa marque de fabrique : l’emploi d’un tissu de coton, le chintz, imprimé avec de grandes roses de chou, des sols en damiers noirs, des portes d’entrée de demeures rouge vif, des plâtres baroques, et de grands imprimés sur les murs. On retrouve la quintessence de son style dans sa grande œuvre : le réaménagement et la décoration du Greenbrier Resort, hôtel de luxe en Virginie Occidentale.




Dorothy Draper fut très populaire aux Etats-Unis, influençant par ses goûts la bourgeoisie américaine. Elle faisait réaliser ses canapés et ses chaises auprès d’artisans, des copies du mobilier élégant et traditionnel de l’époque de la Régence (Regency) en Angleterre (début du XIXe siècle). D’où l’origine du mot « Regency » dans Hollywood Regency, qui renvoie aussi aux bâtiments construits en Grande-Bretagne à l’époque où George IV (1762-1830) fut prince-régent. En Angleterre, le style Regency fait référence à une synthèse des traditions nationales, des éléments de style georgien, un retour à l’Antiquité dont s’est beaucoup inspiré William Haines (éléments gréco-romains : colonnes, frontons, portiques), une architecture néo-classique, et à un sentiment bourgeois attaché au confort intérieur.
Alors que le style Hollywood Regency est déjà très populaire dans les années 50 aux Etats-Unis, Florence Knoll édite sous la marque éponyme et à la même période avec succès les pièces des designers scandinaves. Un design pour le moins beaucoup plus épuré et fonctionnel... Pour autant, le style brillant du Hollywood Regency influença les designers et fabricants européens de mobilier qui utilisèrent des matières dorées, comme le laiton. Une appétence pour le doré qui perdura dans les années 60 et 70.








Populaire à Hollywood et en Californie dans les années 20 à 50, le style Hollywood Regency renvoie à l’époque dorée du cinéma américain. Devenu une arme marketing pour installer l’image glamour des stars hollywoodiennes, il s’est progressivement diffusé dans la société américaine, sous l’impulsion, notamment, de la décoratrice d’intérieur Dorothy Draper. C’est un style que les nouvelles générations de décorateurs/designers n’hésitent plus à combiner avec des éléments contemporains et qui reste attaché à l’expression d’une certaine réussite sociale ...

François Boutard